« Les scientifiques nous avertissent que si l'industrie devait aller de l'avant, elle causerait des dommages permanents et généralisés à notre océan, y compris la destruction d'anciens écosystèmes, l'extinction d'espèces, et risque également de perturber le stockage critique du carbone dans les profondeurs », rappelle Sofia Tsenikli, responsable de campagne à la Deep Sea Conservation, une coalition de plus d'une centaine d'ONG opposées à l'exploitation minière des grands fonds marins.
Pourtant, la menace n'est pas écartée à l'issue d'une nouvelle réunion de l'Autorité internationale des fonds marins (AIFM) qui s'est achevée le 31 mars, à Kingston (Jamaïque). Cette réunion a progressé en faveur d'une pause dans la marche vers l'exploitation, rapporte la coalition. Le Vanuatu s'est joint aux quatorze États, dont la France, qui réclament cette pause, un moratoire ou encore une interdiction. Mais, dans le même temps, les 36 membres du conseil de l'AIFM n'ont pas réussi à s'entendre sur une procédure pour traiter les demandes de licences provisoires à compter du 9 juillet 2023. Des licences qui peuvent être approuvées par seulement douze de ces membres. L'État insulaire de Nauru a en effet utilisé une faille juridique en juin 2021, pour le compte de l'entreprise minière canadienne The Metals Company (MTC), qui contraint les membres de l'AIFM à adopter une réglementation de l'exploitation des grands fonds marins ou à se positionner sur les demandes de licences d'exploitation d'ici à juillet 2023.
« Les gouvernements laissent imprudemment une brèche ouverte dans laquelle les industriels pourront s'engouffrer pour démarrer l'exploitation minière des océans dans le courant de l'année, s'indigne François Chartier, chargé de campagne océans chez Greenpeace France. Cette issue profondément irresponsable est une occasion manquée de signifier clairement, dans la foulée du traité mondial historique sur la haute mer, que l'ère de la destruction des océans est révolue ». Une nouvelle réunion du conseil, mais aussi de l'assemblée, de l'AIFM doit se tenir du 10 au 28 juillet prochain. « Tout va se jouer lors de cette ultime réunion, conclut François Chartier. (…) C'est désormais aux gouvernements de se positionner du bon ou du mauvais côté de l'histoire pour la protection des océans. »